Painkilleur a écrit:
(...)Malgré tout je reste persuadé que répartir la richesse d'une poignée sur des millions de personnes ne signifie rien économiquement parlant ^^
Si tu en es persuadé, c'est que tu dois avoir des raisons pour ça ^^
Pourrais-tu les développer stp ? Parce que ça m'intéresse
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@ sarkocescu : merci pour l'info, j'avais vaguement entendu parler de l'Islande mais sans approfondir et je n'étais pas au courant de ce que le peuple tentait de mettre en place, je ferai des recherches mais si tu avais le lien d'une doc à me passer je suis preneuse \°/
Je suis en train d'écouter les réponses de Jacques Généreux (
14 questions à Jacques Généreux) et de retranscrire en même temps (parfois je résume, ça prend du temps), mais déjà je peux transmettre quelques grandes lignes :
- les entraves de marge de manoeuvre auxquelles sont soumis les gouvernements vis à vis de la pression des marchés financiers qui ont déclenché la crise financière dont la conséquence est la dette
privée (et non pas
publique) se sont les gouvernements eux mêmes qui les ont mis en place avec des lois. (il explique quand et comment).
Ils se sont en quelque sorte mis eux même les menottes aux mains mais elles sont en plastique, c'est à dire qu'ils peuvent les casser s'ils le veulent, car les spéculateurs n'ont que le pouvoir qu'ils leur donnent.
Ceci provoque un résultat qu'ils ne cassent pas, pourquoi ?
Je cite :
Citer:
Ils obtiennent d'abord le fait que dans l'entreprise et dans l'économie les plein pouvoirs sont donnés aux gestionnaires des capitaux. Les gestionnaires de capitaux n'étant soumis à aucune contrainte, il vont disposer d'opportunités d'échanges dans le monde entier, ils ont un pouvoir de chantage inédit, sur les entreprises, sur les travailleurs et sur la société elle-même ; ils peuvent dire « si on n'a pas le taux de rentabilité exigé hé bien on vire les directeurs, on délocalise ou on licencie du personnel », bref, ils ont le pouvoir puisqu'ils peuvent en permanence aller chercher un meilleur taux de rentabilité ailleurs, donc ça c'est le premier effet de cette politique.
Donc pour des gouvernements néo-libéraux, qui ont un projet politique, qui est de refaçonner la société avec moins de dépenses sociales, moins de services publics, plus d'assurances privées, plus d'initiatives et de concurrences privées et moins de biens communs et publics , hé bien ce pouvoir donné au capital est essentiel pour renforcer l'exploitation du travail et l'exploitation de la société.
Ce pouvoir donné au capital par la pression des marchés financiers, ça permet aussi d'exiger moins
d'impôts : moins d'impôts sur le capital, sur les patrimoines, sur les revenus financiers, d'exiger moins de cotisations... de charges comme on dit, hein, entre guillemets, sociales, bref, ça impose le « dumping » fiscal et social.
Comme c'est difficile bien évidemment pour des gouvernements, d'entrée de jeu, surtout dans des sociétés européennes qui sont habituées à un autre modèle, de dire « notre projet de société, c'est qu'il y ait moins de biens publics et d'avantages de privés pour une minorité », il vaut mieux présenter ça comme les faits d'une impossibilité technique ou d'une pression mondiale irrépressible.
Et c'est ce qui se passe : grâce à la pression des marchés financiers, au pouvoir du capital, on peut dire aux citoyens « ah ben vous voyez maintenant, que voulez-vous... au niveau national on ne peut plus grand chose, devant cette économie mondialisée, cette puissance de la finance, on est bien obligé de se soumettre à une discipline commune et donc les politiques atroces... que nous vous imposons sur le plan social et qui, en effet, profitent à des minorités, ben, que voulez-vous, c'est l'effet irrépressible de la soumission à ces contraintes financières. Si on ne le faisait pas, les capitaux s'en iraient, les riches s'en iront, ce serait encore pire si on ne menait pas cette politique antisociale, et donc les lois de l'économie mondiale maintenant nous obligent à mener cette politique »
Voilà, c'est à ça que sert cette apparente réduction des marges de manœuvre des gouvernements.
Ensuite il dénonce le laxisme de la gauche des années 90 et dénote 3 types de gauche à l'heure actuelle en soulignant un phénomène de conversion d'une part, et de l'autre, d'auto-conviction d'impuissance, due à l'ignorance justement de ces
possibilités de marges de manoeuvres.
Citer:
Regardons les faits, la réalité, sans faire de procès d'intention.
Il y a une grande vague néolibérale dans les années 80 qui mettent en place cette grande déréglementation et ces nouvelles politiques avec les effets que l'on sait.
Bien.
Mais dans les années 90, les citoyens, en Europe en particulier, voient bien que ces politiques produisent non pas la prospérité et la mondialisation heureuse que nous avaient chantées certains, mais produisent la régression sociale, hein : l'intensification du travail comme jamais, donc le stress au travail, maintenant on en est au suicide au travail, les délocalisations, les pertes d'emplois, le chômage, la pauvreté qui s'installe dans les pays riches... Bon, il voit le résultat.
Et donc il y a une sanction, et la sanction c'est qu'à peu près partout en Europe, quasiment, en tous cas dans l'Union européenne de l'époque, l'Europe à 15, hé bien la Gauche revient au pouvoir.
Alors la Gauche, quoi. Les socialistes c'est des sociaux-démocrates, des travaillistes en Angleterre, Lionel Jospin en France, la Sociale Démocratie dans l' Europe, à peu près 13 pays sur 15 à la fin des années 90 sont gouvernés avec des socialistes ou des sociaux-démocrates...
Or que se passe-t-il à ce moment là ? Alors qu'il y a une claire sanction de la part des citoyens et des électeurs de cette orientation néolibérale des politiques... Que se passe-t-il ? Hé bien, rien.
C'est à dire qu'on est obligé de constater que cette Gauche au pouvoir en Europe n'a rien fait réellement pour contrecarrer le mouvement qui avait été pris.
En tous cas rien de sérieux contre la déréglementation financière, rien en Europe dans la construction européenne, hé bien pour remettre l'Europe pour remettre sur les rails du progrès.
Par exemple en 1997 au moment de la négociation du Traité d'Amsterdam, Lionel Jospin nous avait promis qu'il ne signerait pas si un certain nombre de conditions n'étaient pas remplies... bon, le rapport de forces n'était pas là, il était seul et isolé face à une Sociale-démocratie Européenne déterminée à ne rien changer dans le fonctionnement de l'union européenne. Bon ben finalement
il a signé, il n'aurait pas du, mais il a signé, il était seul et isolé, et donc on n'a rien obtenu.
Force est de constater que non seulement la Gauche n'a pas résisté mais elle a activement participé à la déréglementation financière, à la tournure disons, néolibérale des politiques en Europe.
Nous avons ici une difficulté supplémentaire : non seulement nos concitoyens aujourd'hui peuvent penser qu'il n'y a plus de marge de manœuvre concrète, technique, du fait de la mondialisation...
... et c'est ce à quoi j'essaie d'en venir évidemment à démonter, en montrant que ce n'est pas vrai car on a des instruments. Mais ce qui les conforme dans ce sentiment d'impuissance, c'est que même quand la Gauche est au pouvoir ou était au pouvoir, hé bien apparemment en tout cas elle ne pouvait pas faire autrement puisqu'elle n'a pas fait autrement.
La réalité, c'est qu'une partie des élites de la Sociale démocratie européenne s'est effectivement convertie aux idées néolibérales ; ils croient effectivement que le libre échange, la liberté de finance, ce sont en fait de nouveaux moyens d'assurer le progrès.
La façon moderne d'être de Gauche est de poursuivre des valeurs de Gauche... hé bien c'est de laisser plus de place à la concurrence, à la flexibilité du travail.
Une partie s'est réellement convertie aux idées néolibérales, donc ne constitue plus une alternative politique, puisqu'ils croient à peu près à la même chose que les dirigeants de la Droite néolibérale.
Et une autre partie de cette Sociale démocratie reste avec des valeurs plus authentiquement de Gauche mais est totalement tétanisée par le mythe de l'impuissance, justement.
C'est à dire qu'ils ont internalisé le discours de leurs adversaires : ils croient vraiment qu'à cause de la mondialisation, à cause de la pression des marchés, ils croient vraiment qu'ils ne peuvent plus faire ce qu'ils veulent et donc qu'ils doivent d'abord se soumettre à des contraintes financières, à des contraintes d'équilibres budgétaires, avant de pouvoir faire quelque chose.
C'est ce qu'on voit aujourd'hui par exemple dans le discours d'un François Hollande, qu'on ne peut pas suspecter d'avoir d'autres objectifs que ceux de la justice, du progrès social etc. qui sont certainement les siens, mais qui nous explique qu'avant de pouvoir mener une autre politique, il faudra d'abord passer par une cure de discipline budgétaire, c'est qu'il a internalisé l'idée qu'on ne peut pas faire autrement.
Vous avez finalement en Europe 3 Gauches, il y a :
la Gauche qui s'est convertie au néolibéralisme purement et simplement : on ne peut rien en attendre
la Gauche qui ne s'est pas convertie mais qui s'est elle-même convaincue de sa propre impuissance : qui est donc tétanisée par son ignorance sur les marges de manœuvre et par l'impuissance qu'elle s'inflige à elle-même
et puis ben, heureusement, d'autres forces de Gauche en Europe comme Die Linke en Allemagne, comme le Front de Gauche en France, qui elles ont l'intention d'utiliser pleinement toutes les marges de manœuvre qui sont réelles, de la puissance pour sortir du système et pour véritablement combattre cette mondialisation libérale et le capitalisme financier.
(...)
Oui, alors ça ne tombe pas du ciel mais d'abord, rappelons que nous ne vivons pas principalement une crise de la dette publique. Nous sommes actuellement dans les conséquences d'une crise de la finance et de la dette privée.(...)
Je me suis arrêtée là et n'en suis qu'au premier quart de l'entrevue.