Forum Heroes' Chronicles

Kayou
Mage Humain.
Fiche de personnage ISO 160-3.

1. Un enfant difficile

A peine âgé de six ans, un enfant, déposé aux portes du Royaume des Hommes, est recueilli par des prêtres, qui lui dispenseront un enseignement. Très introverti, il se faisait constamment rabrouer pour sa dissipation, qui l'attirait dans un monde connu de lui seul. Où allait-il, dans ces moments d'égarement? Peut-être ne le sait-il pas tout seul. Et qui pourrait le savoir alors? Certains enseignants prenaient son mutisme pour un manque d'intérêt, sinon de respect, et finirent par totalement l'ignorer. Kayou est désormais son surnom: muet comme une tombe, aussi vivant qu'une roche, un cœur de pierre. Et pourtant.

Seule Linael, une prêtresse, sembla s'inquiéter de lui. Elle le prit comme aide personnel, et lui dispensa un enseignement tout particulier pour le sortir de sa léthargie. Et cela marchait. Il commençait à prendre conscience de son existence, et de celle des autres. Linael parvint même à lui apprendre quelques rudiments de soins pour apporter son aide à ses prochains. Il parvenait ainsi à soigner de légères blessures. Mais il manquait toujours de passion, quoi qu'on lui demande. Linael le lui répétait sans cesse. S'il ne cultivait pas ses dons, il le regretterait. Et il le regrettera.

Lors d'une sortie pour cueillir des plantes, pour la préparation de cataplasmes, sous la falaise qui protège le royaume humain, son plus grand don lui fut révélé. Nombreux étaient les hommes et les femmes qui profitaient de cette belle journée. Et la paroi, qui tenait bon depuis des temps anciens, la paroi qui devait protéger le royaume, la paroi était fatiguée. Elle a tenu les assauts répétés de races monstrueuses, mais en ce jour, elle n'en pouvait plus. Et pourtant, elle a demandé de l'aide. Les zébrures qui parcouraient ses flancs. Les pierres qui se détachaient. La végétation qui s'affaissait. Mais encore une fois, les hommes étaient aveugles à ses suppliques. Ils en payèrent le prix.

D'abord, un léger grondement, puis un silence. Et c'est tout un pan de la paroi qui déboule, là où se tenaient des hommes, des femmes, et des enfants. Là où se tenait Linael, debout pour la dernière fois. Seul un jeune garçon survécu.

2. Accusation

Bien qu'il fût retrouvé inconscient, l'éboulis semblait avoir contourné son corps. Des rochers semblaient même s'être fendus en deux à son contact. Et certains signes ne trompèrent pas les prêtres. Cette torpeur dans laquelle le jeune homme était tombé n'avait rien de naturel. Tous les symptômes correspondaient. Il avait utilisé de la magie, à l'état brut, sans aucune finesse, sans aucune maîtrise, mais puissante. Trop puissante pour son corps frêle. Et cela l'a dépossédé de toute son énergie. Les prêtres parurent plus étonnés qu'il survive à cette épreuve-ci. Car c'est bien de survie dont il était question. On ne formait que peu d'espoir sur son rétablissement.

Mais, pour son bonheur ou son malheur, il finit par se réveiller. Les évènements étaient encore brumeux à son esprit, et loin de lui permettre de récupérer de son état, on commença à l'accabler. Comment avait-il osé? Tous ces gens, toutes ces familles. Trop orgueilleux pour avouer une faiblesse, les hommes avaient là un bouc émissaire tout trouvé. Ils avaient la preuve qu'il avait pratiqué de la magie. Et ce mur qui se dressait depuis des générations ne pouvait pas tomber tout seul. Il n'en fallait pas plus pour que des rumeurs commencent à circuler. Et voilà que tout finit par être sa faute. Il fut conclut que Linael enseignait la magie à Kayou, et qu'une expérience s'est mal passée. Il était trop jeune pour savoir ce qu'il faisait, et c'est Linael qu'il blâmait de tous les maux. Si elle avait survécu… Une chance pour elle qu'elle y ait trouvé son trépas.

Mais à cet instant, une seule pensée le traversait. Linael. Linael était morte. Celle qui lui avait tant apporté. Celle-là même qui l'avait prévenu. Et le voilà qui replonge dans son monde. Pourquoi? Pourquoi? Un jour passe. Puis deux. Il est toujours allongé.

3. La fuite

"Que dois-je faire, Linael?".
Et cette question tourne dans son esprit. Et tourne. Et tourne. Et un jour, au petit matin, un être étrange passe. Il n'en a jamais vu de pareille. Mais il en a entendu parlé. De longues et fines oreilles. Un détail qui ne trompe pas. Tout de vert vêtu, Kayou remarqua surtout l'épée qui pendait à sa ceinture. Un Elfe. Il remue des lèvres, mais Kayou n'entend pas ce qu'il dit.
"Que dois-je faire, Linael?"
"Ecoutes cet homme, je t'en prie!"
A-t-il rêvé?
-"Linael?"
Un silence. La voix de l'Elfe résonne comme un bruit de fond. Il se concentre, et la voix se fait plus distincte.
- "…m'accompagne. J'ai entendu…"
L'effort le fatigue.
"…à t'apprendre. Tu es libre…chez Bonaccueil, un vieil ami. Mais je ne pourrai guère rester ici longtemps. Pas plus de deux jours, dans le meilleur des cas…"
L'Elfe se tut et le regarda longuement. Une voix de femme:
- "Cela fait des jours qu'il est ainsi. Il n'y a guère à en tirer. Linael aur…".

Kayou ouvre ses yeux. Il est seul. Encore. Il y a une missive sur le tabouret, à portée de main. Mais qu'importe, pense-t-il. Il n'en a cure. Et pourtant, elle attire son regard, petit à petit. Le message ne semble pas bien long, à peine quelques lignes, d'une écriture singulière. Il regarde sa main, la peau sur les os, toute faible. Mais elle finit par se tendre, puis saisit la missive et la porta à son regard. "Je ne peux rester plus longtemps. Je dois partir ce soir à la tombée de la nuit. Morhindafol"
C'était probablement un message de l'Elfe. Mais qu'attendait-il de lui? Qu'il aille au diable.

-"Il est réveillé, et il semble plus conscient que d'habitude. Il est plus que temps de lui toucher deux mots"
Une demi-douzaine de personnes rentre dans la chambre.
-"Tu ne peux pas rester ici jusqu'à la fin de tes jours. Il faut te bouger".
-"On pourrait te pendre pour ça, si tu n'avais pas été si jeune."
-"Et toutes ces familles qui ont un proche à déplorer. Je me tiendrais à l'écart à ta place, si tu vois ce que je veux dire."
Encore des reproches. Toujours des reproches. Et ils n'arrêtaient pas de l'accabler. Mais il ne les écoutait déjà plus. C'est vrai, il était temps de partir. Ou plutôt de fuir. De fuir ces gens qui ne le laissaient pas tranquille. De fuir ce monde. Il se redressa péniblement, posa un pied au sol, un second. Il tendit à nouveau un bras, vers sa tunique, l'enfila et fourra la missive dans sa poche. Etrange, il n’y avait plus un bruit. Les visages s'étaient figés, et l'observaient, visiblement impatient. Il tenta une première fois de se relever, mais il s'écroula à même le sol. Ses jambes faibles n'avaient pas fait d'exercice depuis trop longtemps. Personne ne vint lui porter d'aide. Il se mit sur les genoux, s'appuya sur un pied du lit et parvint à se redresser. Le voilà debout. Il hésitait à faire quelque mouvement, de peur de tomber à nouveau. Il se tourna doucement face à ce petit comité. Il voudrait tout de même les remercier. C'est ce que Linael lui avait appris à faire. Il ouvrit la bouche, sèche et pâteuse, mais nul bruit ne put en sortir. Il ferma les yeux, se tourna vers la porte et, un pied devant l'autre, il avança.

Il prit le couloir en direction de la sortie. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Cynique. Il était content d'être au rez-de-chaussée. Il s'imaginait déjà devoir descendre des marches, une par une, assis sur le derrière. Mais non, il sortirait, lentement, mais il sortirait. Déjà, une lueur orangée se projetait sur le sol, non loin de lui. Le soleil se couchait. Il passa la porte ouverte et se retrouva dehors. Un silence pesait sur la rue. Il la foula tel un fantôme. Ses pas l'emmenèrent dans le sens de la pente. C'était tellement plus facile. Et cela le rapprochait des portes de la ville. S'il se dépêchait, il pourrait sortir avant la fermeture, et tout serait fini.

Mais pourquoi le destin s'acharnait-il sur lui? Il n'avait rien fait à personne. ET il ne demandait rien à personne. Il voulait juste qu'on le laissât tranquille. Seul Linael le comprenait. Mais elle était partie maintenant. Il était seul. Il entendit des bruits de sabots derrière lui. Mais il continuait, un pas après l'autre. Il ne méritait pas ça. Un corps si faible, comme un vieillard. Il souhaitais en finir au plus vite. Il n'en pouvait plus. Le cheval arriva à sa hauteur. Un cavalier, avec une capuche baissée qui couvrait entièrement son visage, le chevauchait. Et cette épée qui dépassait… Deux mots sortirent d'eux-mêmes.
-"Aidez-moi…"
Etait-ce vraiment sa voix qui avait un tel timbre? Une larme perla à un œil. C'est tout ce qu'il put encore tirer de son corps. Le cavalier se retourna, rehaussa sa capuche, sans dévoiler son visage, et sembla un instant pétrifié, comme devant la mort elle-même.
-"N'ayez crainte jeune homme. Je n'ai jamais refusé d'apporter mon aide. Mais c'est folie que de sortir seul dans votre état. Vous auriez dû m'appeler et ...".

Ce fut tout ce que Kayou entendit ce soir là.

4. Un nouvel instructeur

-"Allez, garçon, manges. Tes forces reviendront doucement. Je ne pourrais rien t'enseigner avant que tu ais récupéré correctement."
Et l'Elfe de lui tendre un bout de pain et un gobelet en bois. Kayou n'avait pas très faim. Son gobelet était merveilleusement gravé. Une fête semblait y être représentée. On pouvait y voir nombres d'elfes, ainsi qu'un enfant, souriant. Il n'avait jamais vu d'enfant Elfe. Et chose plus étrange encore, il y avait une femme, humaine. Morhindafol s'était allongé contre un arbre, et semblait s'être assoupi. Il émanait de lui une aura de sécurité. Kayou ne savait pas où ils étaient. Ils s'étaient visiblement enfoncés dans une forêt pour passer la nuit à l'abri. Il porta le liquide à la bouche. Il n'avait jamais rien bu de semblable. Sans saveur particulière, la boisson sembla se répandre à travers tout son corps, jusqu'à la pointe de ses doigts, bien qu'il n'ait réussi à n'en avaler qu'une gorgée. Il reporta le gobelet à ses lèvres. Cette fois, l'effet était moindre, mais toujours palpable. Il reporta son attention sur le bout de pain. Un pain courant, à première vue, mais une fois sur le palet, toute sa saveur se révèlait. Il fut envahi par ces sensations nouvelles, qui lui coûtaient beaucoup d'effort. Mais il finit tout de même ce frugal repas avant de sombrer dans le sommeil.

Il se réveilla peu avant l'aube. Morhindafol n'était pas là, mais son cheval n'était pas loin, il l'entendait brouter patiemment les quelques touffes d'herbage. Son cavalier ne pouvait pas être bien loin. Il entendit également le léger bruissement d'un cours d'eau. Il entreprit d'aller se rafraîchir. Il se traîna pratiquement à quatre pattes, tendit une main vers l'eau glacée, et s'en badigeonna le visage. Son esprit s'éclairci un peu. Il suivit le cours d'eau du regard. Il s'enfonçait plus profondément au cœur de la forêt, en pente douce. Il semblait si paisible. Il se laisserait bien emporter par son faible courant, pour découvrir les contrées qu'il traversait et la force qu'il acquérait au fil des distances parcourues.
-"Tu te renforceras aussi, avec le temps. Comme ce cours d'eau, tu te dois d'avancer toujours plus loin, pour découvrir des choses que tu n'aurais jamais imaginé. Mais contrairement à cette eau, tu es aussi capable de remonter n'importe quelle pente. Aussi bas que tu puisses tomber, il faut te relever. C'est ainsi que tu développeras ton don. Par ta seule volonté. Et par la connaissance. Elle est essentielle aussi. Je t'apprendrais ce que je peux. Après…nous verrons bien."
Kayou n'osait dire un mot. Il avait été surpris de l'apparition soudaine de l'Elfe. Depuis combien de temps l'observait-il? "En route. Nous suivrons ce cours d'eau un certain temps. Je pars devant, avec Illohan. Contentes-toi d'avancer." Et le voilà qui partit, après avoir jeté quelque chose à Kayou. Un fruit. Voilà pour le petit déjeuner. Morhindafol avait déjà disparu derrière des arbres. Il croqua une première bouchée, et se lança sur les traces du cheval. Elles étaient à peine visible, et finirent même par disparaître totalement, mais autant qu'il put en juger, la direction semblait effectivement suivre le cours d'eau. Une longue marche commençait.

Cela faisait des heures qu'il marchait quand il tomba sur un panier végétal, contenant du pain, quelques baies et un nouveau fruit. Il y avait des traces de sabots autour, à peine visible. Probablement ceux d'Illohan. Il s'empara du panier, et se remit en route. Il ne savait pas pourquoi il continuait, mais il préfèrait ne pas y réfléchir. Et les heures passèrent. La lumière commençait à diminuer. Et toujours aucun signe de Morhindafol. L'inquiétude lui étreignit peu à peu le ventre. Il continua à marcher, ne suivant le ruisseau qu'à son faible bruit. Il pressa le pas. Il ne s'en serait pas cru capable, mais sa peur lui donnait des ailes. Il s'apprêtait à crier quand une voix se fit entendre.
-"Enfin, te voilà. Manges un peu et profites d'un peu de repos. Demain t'attends encore une longue journée."
L'Elfe s'appuya contre un arbre. Kayou ne saurait dire s'il dormait vraiment. Mais il suivit ses conseils. En effet, le jour qui suivit, et les jours qui suivirent, se ressemblèrent. Du matin au soir, Kayou marchait seul. Parfois, Morhindafol laissait des signes sur le sol pour lui indiquer des buissons avec des baies, des arbres avec des fruits ou des noix, un point d'eau fraîche.

Petit à petit, Kayou se renforçait. Il reprenait du volume, forcissait jour après jour. Il pouvait désormais avaler des distances considérables chaque jour. Il s'essayait également à courir parfois pour arriver plus tôt au camp et impressionner Morhindafol. Mais ce dernier parvenait toujours à évaluer la distance du jeune homme, et l'attendait quand la nuit était déjà bien avancée. A chaque fois, Kayou était trop exténué pour tenir une discussion et s'endormait aussitôt couché.

5. Le défi de Morhindafol

Un matin, qui ressemblait singulièrement à tous les autres, Kayou trouva un sac tressé, qui laissait apparaître son contenu: deux belles pierres bien rondes. Il ne savait pas à quoi elle pouvait bien servir, mais il voyait en ce sac un défi, qu'il se sentait prêt à relever. Il mit le sac sur son dos, et partit au pas de course. Il parvenait maintenant à subvenir à ses besoins, et Morhindafol semblait l'avoir deviné. Il ne laissait plus aucune trace derrière lui. Il se contentait de l'attendre à la nuit tombée.
-"Comment s'est passé ta journée aujourd'hui?"
C'était la première question que Morhindafol lui posait depuis des jours. Il lui avoua que le poids de son sac le ralentissait, et qu'il se demandait à quoi cela pourrait servir. Mais il n'obtint pas de réponse à ses questions.
-"Tu ne vois dans ces pierres qu'un poids qui pèsent sur tes épaules. Elles contiennent pourtant un pouvoir qui t'appartient. Et il faudra t'en saisir pour continuer à me suivre. Sans quoi tu ne sortira jamais de cette forêt."
Là-dessus, l'Elfe s'adossa à un arbre et ferma ses paupières. Kayou rumina longuement ces paroles. Etait-il prisonnier de cette forêt?

Et le matin suivant, il trouva une pierre supplémentaire dans son sac. Le sac lui parut à peine plus lourd que la veille, mais avant que le soleil ne pointe au plus haut, il commençait à se sentir épuisé. Il fit une pause. Cela n'avait aucun sens pour lui. Que lui voulait donc Morhindafol? Continuer de le faire souffrir en ce monde? Il ne semblait pas lui vouloir du mal pourtant. Il lui avait apporté son aide, lui avait enseigné des moyens de subsistances, et semblait l'accepter, à sa manière. Et maintenant, il le torturait avec ce sac de pierres. Que pouvait-il bien en tirer? Il reprit sa route.

Quand il arriva le soir, il trouva Morhindafol déjà assoupi contre un arbre. Il laissa tomber le sac au sol, sans ménagement. L'ombre d'un sourire sembla s'esquisser sur les lèvres de cet Elfe de malheur. Kayou se retourna, alla s'asseoir derrière un arbre, pris quelques-unes des provisions qu'il avait ramassées dans le courant de la journée, puis s'allongea et sombra dans un sommeil sans rêve.

Une nouvelle pierre avait trouvé sa place dans son sac. Il resta assis à côté, à le contempler. "Elles contiennent pourtant un pouvoir qui t'appartient." Les mots de Morhindafol lui revenaient, mais ils n'avaient pas plus de sens aujourd'hui. Il se releva, mis le sac sur son dos, et pris le chemin, non sans se remplir le ventre de quelques baies d'un buisson qui lui avait échappé dans l'obscurité de la nuit précédente. Encore humides de la de la rosée matinale, elles libéraient toute leurs saveurs. Il ne savait toujours pas où ce chemin le mènerait, mais c'était le seul qui se présentait clairement à ses pieds. Il n'avait maintenant guère le choix. Suivre Morhindafol ou rester ici au milieu de nulle part.

Le poids sur ses épaules pesait sévèrement sur lui, aussi bien physiquement que mentalement. Son guide ne semblait pas vouloir s'expliquer sur cet exercice inutile. Bien sûr qu'il ne voyait dans ces pierres qu'un poids. C'est là tout ce que ces pierres voulaient bien partager avec lui. De plus, la disposition des pierres dans le sac n'était guère confortable. Leur forme ronde créait de véritables points douloureux dans son dos. Il ne finirait pas la journée en continuant ainsi, il en était sûr. Et il se mit à maudire ces pierres, si lourdes pour ses épaules, si douloureuses pour son dos. A les maudire comme il n'avait jamais maudit. A bout de souffle, il se délesta de son sac qu'il jeta violemment par terre. Il lui asséna des coups de pieds qui lui apportèrent plus de douleur que de réconfort. Il jurait tout haut, sa fureur à son paroxysme, quand un fait étrange se produisit. Son sac, après s'être légèrement gonflé, semblait s'être affaissé. Sa vision se troubla et il tomba à genoux, comme vidé de toute énergie.

6. Révélation

Kayou se ressaisit doucement. Il s'assit, grignota un peu et but tout son saoul. Il savait ce qui s'était passé, mais il n'en revenait pas. Il avait encore pratiqué de la magie, et il en était ressorti épuisé. Il n'avait pas perdu connaissance, cette fois, mais cela lui avait quand même coûté. Il n'osait pas regarder son sac. Ce pouvoir lui faisait peur. Et cela voulait dire qu'il était peut-être vraiment l'initiateur de cet éboulement, même si c'était inconsciemment. Il préféra ne pas y réfléchir plus longtemps. Il jeta son sac sur le dos, et se remit en marche. C'était déjà plus agréable. Les pierres, brisées en mille morceaux, épousaient la forme de son dos. Il sourit, distraitement.

Comme tous les jours,Morhindafol l'attendait à la nuit tombée. Toujours adossé à un arbre, il ouvrit les yeux lorsque Kayou jeta le sac au sol. Le bruit mat bien particulier ne laissait aucun doute sur la consistance du contenu. Le jeune homme était parvenu à ce résultat plus tôt que prévu.
-"C'est bien, garçon. Mais combien penses-tu encore pouvoir en porter?". Kayou ne se faisait pas d'illusion. S'il continuait de cette façon, il ne tiendrais pas longtemps. Mais il ne voulait pas encore l'admettre. Il devrait trouver une solution rapidement.
-"Pensez-vous que je suis à l'origine de… cet accident?", demanda-t-il, doucement. L'Elfe semblait ne pas avoir entendu, ou ne pas être disposé à répondre. Kayou allait se retourner quand Morhindafol répondit.
-"Je ne sais pas. Mais toi. Voulais-tu… Si c'était toi, je pense que tu le saurais."

Le lendemain, il trouva une nouvelle pierre. Cette fois, elle était posée sur le sac. Il la prit en main, l'observa sous tous les angles. Elle était bien plus grosse que les autres. Il la rangea dans le sac, et se concentra sur la pierre. Il essayait de se rappeler comment il avait procédé la veille. C'était sous le coup de la fureur qu'il y était parvenu. Mais les rares fois où il avait pu observer un magicien faire usage de son pouvoir, jamais il ne l'avait vu dans un tel état. Il y avait probablement un moyen d'y parvenir. Il visualisa la pierre, telle qu'il se la représentait dans le sac. Ronde, rugueuse, lourde. Il cherchait plus particulièrement ce pouvoir qu'elles étaient censées contenir, et sur lequel il pourrait agir. Il sentait quelque chose. Il capta la force qui donnait à la pierre son unité. Tout était lié, en équilibre. Chaque partie était à sa place. Il commença à chercher un point faible dans cet assemblage. Mais il n'en trouva guère. Il choisit donc un point, sans particularité, sur lequel il se focalisa. Il lui transmettait toute sa force, pour déstabiliser l'architecture complexe. Mais comme en réponse à son agression, le roc concentrait son potentiel au même point pour conserver son équilibre. Il relâcha la pression. Rien ne se passa.

Pour briser une pierre, physiquement, ce n'était pas la force qui comptait, mais la violence du coup porté. On pouvait taper un rocher toute une journée, il ne serait qu'égratigner si les coups n'étaient pas assez puissants. Il suffisait d'un coup. Kayou se focalisa à nouveau sur la pierre, concentra toute son énergie en lui. Et encore. Et encore. Et enfin, il envoya tout sur ce point précis, à peine discernable. La tête lui tourna sévèrement. Mais le résultat était là. Et il ne s'était pas contenté de réduire la pierre en morceaux. C'était pratiquement du sable qui s'écoulait par les interstices du sac. Voilà qui serait plus léger, désormais. Le sac posé sur le dos, il se remit en route. Le sable s'écoulait de son sac en laissant une fine ligne derrière lui.

7. Leçons

En chemin, il continua ses exercices. Et tout le contenu de son sac ne fut à la fin de la journée que poussière, laissée à la bonne volonté des vents. C'est les dernières petites pierres qui lui avaient demandé un effort plus particulier. Elles étaient plus difficiles à se représenter, et souvent, elles se contentaient de sautiller dans le sac, comme pour se moquer de ses efforts. Il devait d'abord trouver le point de rupture, et doser sa force. Et plus il approchait de ce point précis, plus la réaction était spectaculaire. Le plus petit grain de sable provoquait une petite détonation de poussière. Il en avait d'ailleurs les oreilles qui bourdonnaient encore.

Son sac vidé, il ne s'était pas arrêté. Toute pierre à sa portée émettait un claquement sonore avant de partir en morceaux. Il s'amusait le plus avec les gros rocs qui dépassaient à peine du sol. Il fallait rester à distance respectable, mais c'était une véritable explosion qui entrouvrait le sol, laissant de véritables balafres sur son chemin. Des éclats allaient se ficher profondément dans le tronc des arbres environnants.

Il entendit soudain des bruits de sabots, plus en avant sur le chemin. Morhindafol chevauchait Illohan à toute allure, et droit sur lui. Que se passait-il? C'était la première fois qu'il le voyait avant la nuit tombée. Il semblait poursuivit par un quelconque démon. Mais il ne voyait rien lancé à sa poursuite. Il ne semblait pas non plus disposé à ralentir lorsqu'il arriva à son niveau. Kayou se dégageait du passage quand l'Elfe tira un coup sec sur les rennes, Illohan fit montre de toute sa force et s'arrêta juste à ses côtés. "Mais que fais-tu?" hurla-t-il. Il n'eut pas le temps de répondre. Morhindafol l'empoigna et le passa devant comme un vulgaire sac. Illohan fit demi tour et s'élança au grand galop. Sa position, peu confortable, lui permit cependant d'observer ce qui se lançait à ses trousses. C'était une piste bien voyante qu'il avait tracée derrière lui. Trop voyante pour qu'elle passe inaperçue. Et des créatures de la forêt s'étaient lancées sur sa piste. Il ne les aurait probablement jamais aperçu avant qu'elles ne soient sur lui.

La chevauchée dura un bon moment. Ses membres étaient engourdis, mais il n'osait pas changer de position. Il essayait de se faire le plus petit possible. A la nuit venue, il espéra vainement qu'il s'arrêterait. Mais Morhindafol ne l'entendait pas de cette façon. Il souhaitait manifestement mettre le plus de distance entre eux et ces créatures. Et ce ne fut qu'à l'aube que Illohan ralentit le pas. La bête semblait fatiguée, mais on percevait dans son attitude une confiance aveugle à son maître. Elle ne s'arrêterait que lorsqu'il le jugerait bon, que lorsqu'il serait en sécurité. Ils arrivèrent enfin vers gué. Lors de la traversée, le cheval s'abreuva généreusement. S'il l'avait osé, Kayou aurait également tendu la main pour hydrater sa gorge sèche. Parvenu de l'autre côté, Illohan s'arrêta. Morhindafol relâcha sa prise et Kayou finit rapidement à terre. L'Elfe descendit à son tour et se dirigea aussitôt pour s'abreuver. Le jeune homme, lui, ne bougea pas d'un cil.

-"Nous l'avons échappé belle, cette fois, n'est-ce pas Illohan. Alors si je m'attendais à ça! Notre petit magicien à peut-être la folie des grandeur. Tu apprends à réduire une pierre, et tu te mets en tête de détruire tout le Lorndor? Une chance que je ne t'ai pas appris à les déplacer, on aurait finit avec la lune sur la tête. Allons, mon garçon, n'aies pas peur de moi. Je ne te ferais pas de mal. Vas boire un coup, nous devons discuter un peu."
Kayou ne se fit pas prier, même si ce fut d'un œil méfiant qu'il dépassa Morhindafol. Il but à grande gorgée, et à plusieurs reprises. Quand il se retourna, ses compagnons avaient disparu. Il ne saurait probablement jamais comment ils faisaient pour disparaître ainsi. Il se redressa, et remonta un peu le chemin. Ils étaient là. Ils s'étaient mis un peu à l'écart, et l'Elfe commençait à déballer quelques affaires. Il sortait quelques fruits et une pièce de viande. Il invita Kayou à se joindre à lui.
-"Bien, je vois que tu as suffisamment récupéré pour que nous puissions commencer ton apprentissage de magicien. En ce qui concerne la pratique, je pense que nous n'aurons pas de problème. Tu me sembles suffisamment autodidacte dans ce domaine, et c'est tant mieux. Nous ne faisons pas partie du même cercle de magie. Tout ce que je peux t'apprendre sera d'ordre conceptuel ou spirituel. Tu as un pouvoir, tu l'as compris. Mais tu ne peux pas l'utiliser pour faire n'importe quoi. Ce que tu as fait hier est … impressionnant, et je ne m'y attendais pas. Tu as été bien plus rapide que moi. Mais comme tu l'as vu par toi-même, ça n'a pas impressionné le moins du monde les défenseurs de cette forêt. Les créatures qui nous ont poursuivis répondaient à son appel. Ce que tu prenais pour un jeu, ou un apprentissage, et je ne doute pas un instant que tu voulais volontairement la blesser, a forcé cette forêt à se défendre. Elle a lancé à tes trousses ses protecteurs. Et j'ai senti son appel également, mais je ne me doutais pas que c'est après toi qu'elle en avait. Et j'ai fait là une grosse erreur. Tu en as réchappé de peu. Et ce n'est peut-être pas fini."

Et c'est ainsi que commencèrent ses leçons avec Morhindafol. Comme il l'avait dit, il ne lui enseignait pas de choses pratiques. Ils discutaient de ce qui était bien, de ce qui était mal. De ce qui était justifié, et de ce qui ne l'était pas. Kayou s'abreuvait des paroles de son instructeur. Ce dernier connaissait bien des choses. Pour Kayou, cet Elfe recelait plus de sagesse que les sages de sa cité n'en acquérrait jamais. Il n'aurait su dire quel age il avait, mais ses récits trahissaient une expérience qui dépassait largement la vie d'un homme. Il avait parcouru le Lorndor d'un bout à l'autre, et ce plus d'une fois. Il avait combattu avec et contre les chevaliers les plus honorables. Il avait acquis ses connaissances de maintes sources et de maints peuples. Il s'était sorti des traques les plus féroces, avait survécu aux plus terribles batailles que le Lorndor aie jamais vues.

Kayou ne savait pas pourquoi Morhindafol l'avait choisi, lui, pour recevoir son enseignement. Mais il savait la chance qu'il avait eu de le rencontrer. Il tirait le plus d'enseignements possible de ces discussions pratiquement sans fin. Elles représentaient une source intarissable de connaissance, dont Kayou était fier de pouvoir profiter. Il apprit ainsi quand et comment utiliser son pouvoir sans dépasser de limite. A lui de le mettre en application de la façon qu'il jugerait la plus adéquate. Morhindafol ne l'obligeait en rien à respecter son enseignement. Comme s'il savait que sa voie était la bonne, la seule vraie voix que l'on puisse prendre pour être libre et en paix, avec soi et avec les autres.

8. Rencontres

Morhindafol et Kayou continuèrent ainsi leur route pendant des jours, des semaines, des mois. Morhindafol enseignait à son élève ce qui lui faisait défaut. Kayou avait passé sa vie dans la cité des hommes. Il n'avait côtoyé que des humains, et pas les meilleurs représentants d'ailleurs. La prêtrise s'était enfermée dans le royaume humain pour rester en sécurité et abandonnait hommes et femmes qui erraient égarés sur le vaste territoire du Lorndor. Les prêtres vivaient totalement isolés du monde. Si Kayou avait entendu parlé d'Elfes et de Nains à maintes reprises, Grunts, Taurens ou autres Gnomes lui était inconnus. Morhindafol avait fort à faire avec son éducation. Mais son élève était assidu. S'il semblait absent ou, l'Elfe, lui, ne s'y trompait pas. Il entendait presque le travail qu'effectuaient ses rouages. Le garçon était réfléchi, peut-être trop, il se détachait un peu trop du monde pour plonger tout entier dans ses réflexions. Il pouvait même s'y oublier trop longuement, et Morhindafol devait alors l'extirper de ce que tout autre aurait pris pour une rêverie. Ce fût là un problème qu'ils essayèrent de résoudre par divers exercices de concentration. Il fallait que Kayou reste présent et conserve sa conscience de la réalité, sans quoi il se ferait tuer à la première escarmouche.

Une réalité le frappa alors. Ce que Morhindafol lui enseignait n'avait rien d'une leçon de vie, mais plutôt d'une préparation à la survie et au combat. Il disait lui raconter les histoires du Lorndor, mais ses propos étaient toujours teintés de stratégies, de tactiques, de faiblesses pouvant être tournées à son avantage. Ils préparaient Kayou non pas à affronter la vie, mais à affronter la mort que représente tout guerrier en divergence d'opinion. Car ainsi allait la vie en Lorndor. Beaucoup de différents se réglait par la lame et l'épée, seuls outils de justice implacables.

C'était une journée identique à toutes les autres. Peut-être faisait-il plus nuageux que d'habitude, mais à peine. Tout deux marchaient à un pas un peu forcé, Kayou un bâton à la main, Morhindafol les rênes d'Illohan. Ils avaient accéléré le pas sans raison apparente, mais Kayou ne doutait pas qu'il y ait une raison. Il y avait toujours une raison. L'Elfe semblait avoir un don de prescience très développé. Il n'était pratiquement jamais surpris. Il ne l'a d'ailleurs été qu'une fois en sa présence. Il trahissait rarement ses sentiments aussi. Mais quelque chose transparaissait dans son attitude aujourd'hui. Kayou en aurait mis sa main à couper. Son empressement, ses pauses prolongées dans ses récits, quelque chose le tourmentait.

-"Surtout, ne bouges pas."
Et ils s'arrêtèrent de concert. Un silence pesant s'était discrètement répandu sur la forêt. Kayou suivi le regard de Morhindafol, sur leur flan droit. Il ne voyait rien, mais l'Elfe avait des sens plus développés que lui, et il avait certainement perçu quelque chose. Il lâcha Illohan, qui fit demi-tour et se sauva d'un pas plutôt placide.
-"Ecoutes-moi bien! Tu vas te cacher. Là, tu vois la vieille souche? Je veux que tu y restes, immobile et muet tant que je ne t'aurais pas fait signe. Si jamais je t'en fais un. Je ne sais pas encore qui c'est, mais il m'a repéré et cherchera probablement à me rencontrer. Il ne dois pas te voir avant…"
Des bruits de pas sourds approchaient.
-"Caches-toi, vite."
Morhindafol se retourna et fit face au bruit, avançant de quelques pas discrets qui l'éloignèrent de la cachette de Kayou.
Kayou se tenait immobile. Il ne voyait plus de Morhindafol que l'ombre qu'il projetait sur le chemin. Tous les sens en éveil, il attendait. Les bruits de pas cessèrent, mais à distance. L'inconnu avait du s'arrêter et profiter de l'abri des derniers arbres pour rester à couvert. Et c'était une voix grave, caverneuse et grondante, qui fit écho dans la forêt, comme si la parole avait été acquise difficilement, avec un organe inadapté.
-"Qui ose perturber la quiétude de la forêt?"
Morhindafol sembla se courber.
-"Nous ne faisons que passer, défenseur de la nature. Loin de moi l'idée de mettre à mal cette forêt qui nous protège."
Des bruits de branches, et des pas qui s'approchaient. Un ombre rejoignit celle de l'Elfe, et grandit au fur et à mesure qu'il s'approchait. Mais elle grandissait plus que de raison. Kayou s'attendait à quelqu'un de normal, peut-être un peut plus grand que Morhindafol. Mais cela dépassait l'entendement. La créature, parce que ça ne pouvait plus être un homme, était au moins deux fois plus grande. Et Kayou ne put retenir un hoquet de surprise.
Un silence. Des bruits de respiration retentirent. L'inconnu flairait l'air.
-"Tu n'es pas seul! Je sens l'humain. C'est lui."
Et la créature de bondir dans sa direction. Kayou était pétrifié. Il ferma les yeux. Une poigne de fer le saisit par l'arrière, d'abord au col, puis à une jambe. Et le voilà qui se balançait la tête à l'envers. Une tâche un peu floue sembla s'approcher, et se jeter au sol. La tête lui tournait, il était incapable de prononcer un mot dans son état d'effroi.
-"Laisses mon ami tranquille, je t'en conjure. Il ne voulait pas faire de mal. Il ne savait pas ce qu'il faisait. Je lui ai enseigné la nature et la vie."
Un nouveau silence. La créature réfléchissait visiblement quant à la suite des événements.
-"J'ai toujours pu te faire confiance, Morhin. Mais ce qu'a fait cet humain est inacceptable".
-"Il réparera ses fautes, j'en suis persuadé".
-"Réparer? Ecoutes-moi, petit humain, je me souviendrai de toi. A notre prochaine rencontre, j'espère que tu auras réparé. Sans quoi tu rejoindras la nature."
La créature le laissa retomber délicatement sur le sol. Kayou fit recula futilement. Ce monstre était gigantesque. Il n'en avait jamais vu de pareil.
-"N'oublies pas. Quant à toi, Morhin, tu te portes garant de lui. Ce qui l'attend t'attend aussi."
-"Je le sais, mais je ne renonce pas. Il manque seulement un peu d'expérience. Mais j'ai confiance en lui."
Le monstre sembla encore une fois réfléchir longuement.
-"Bien. Je te souhaite d'avoir raison, tu le sais bien. Les temps sont difficiles, Morhin, nous nous connaissons depuis fort longtemps."
-"Oui, et je suis heureux d'être tombé sur toi. Comment vas-tu? As-tu des nouvelles?"
Le monstre sembla regarder loin au devant, perdu dans ses pensées.
-"Tant que la nature va, je vais. Des cousins m'ont prévenu de la présence de créature sans vie dans la région. C'est de plus en plus fréquent. Faites bien attention à vous."
La créature se détourna, et commença à s'éloigner. Et sans se détourner elle dit de sa voix tonitruante.
-"N'oublies pas, répares, répares, ou tu ne fera plus qu'un avec la nature. Répares. Répares."
Elle disparut derrière un arbre et petit à petit, et sa voix baissa jusqu'à s'éteindre.
-"Un Tauren?", dit Kayou, d'une voix faible et rouée.
-"Eh oui, un Tauren. Un âpre défenseur de la nature. Quand je te disais que ta destruction massive nous suivrait encore…"

9. Combat

Illohan avait rejoint son maître quelques temps après la disparition du Tauren. Tous les trois repartir. Kayou se remettait à peine du choc. Morhindafol restait pensif.
-"Le Tauren a parlé de créatures sans vie. Je ne comprends pas ce qu'il voulait dire."
L'Elfe prit une inspiration, expulsa, mais resta silencieux. Il secoua la tête.
-"Je ne voulais pas t'en parler encore, mais il faudra bien que tu l'apprennes un jour. Mon ami Taurino parlait de morts-vivants."
-"Des morts-vivants… des personnes mortes qui reviennent à la vie."
-"Les Taurens ont une connexion avec la vie qui dépasse notre entendement. Quoi qu'il en soit, les Taurens ne les perçoivent pas comme des êtres vivants. Les végétaux et les animaux regorgent de vie. Même certains monuments très anciens, des épées légendaires ou des sources d'eau particulières renferment une étincelle de vie, qu'ils perçoivent. C'est ce qu'ils disent, mais tu peux les croire. Ils ne sont pas très doués pour la malice. Les Taurens sont les gardiens de la nature, les gardiens de la vie sans défense. Ils ont du mal à admettre qu'on puisse être aveugle en ce domaine. C'est pourquoi ils sont généralement violents avec les autres créatures qui à leur sens profanent la vie. Même les elfes, qui pensent pourtant vivre en harmonie avec la nature, coupent du bois, arrachent des feuilles pour fabriquer leurs objets quotidiens. Les Taurens ne l'apprécient guère. Celui que nous avons rencontré aujourd'hui peut-être considéré comme l'un des plus patient et diplomate d'entre eux. J'ai acquis sa confiance très difficilement, mais il est beaucoup plus compréhensif que ses congénères."
La journée commençait à s'obscurcir. Ils firent halte et préparèrent rapidement un repas. Ils prirent leur temps. Kayou avait compris qu'ils entraient dans un domaine qui touchait personnellement Morhindafol, et il laisserait son instructeur décider du moment propice où reprendre l'histoire. Ils s'installèrent pour la nuit, mais conservèrent une position assise, plus adaptée à une discussion sérieuse.

-"Bien, je vais continuer. Je t'ai donc dis que les Taurens ressentaient la vie différemment de nous, et notamment dans des objets qui ont un vécu, une histoire particulière. Mais ils ne ressentent rien pour les morts-vivants. Ils sont aussi vide que l'air, ou une pierre quelconque. Ils se sont posés bien des questions à leurs sujets. Ils y ont réfléchi plus que sur aucun autre sujet.
Il existe plusieurs points de vue pour chaque chose. Hélas, la majorité des Taurens ont fait des morts-vivants une sorte de divinité, une réincarnation vivante d'êtres supérieurs. C'est pourquoi on peut les voir souvent s'allier. Mais ce point de vue se défend comme un autre. Les morts-vivants se contentent de peu pour vivre. Ni froid, ni faim. C'est ce qui les rend redoutables. Il n'y a pas vraiment de moyens de les affaiblir, et c'est toujours contre un guerrier en pleine possession de ses moyens à qui l'on a affaire. Et ils sont toujours dotés d'une persévérance et d'une ténacité affligeante. C'est sûrement ce qui leur a permis d'atteindre leur statut. De leur vivant, ils n'ont pas pu obtenir ce qu'ils désiraient le plus, et n'acceptant pas leur mort, ils reviennent parmi les vivants pour accomplir leur rêve inachevé. Mais ce n'est jamais un avenir louable qui les attend. Leur soif, de pouvoir, de revanche, peu importe, finit par les déborder, et ils finissent par ne plus jamais vouloir partir et par oublier pourquoi ils sont revenus. Dès lors, ils errent sans but véritable parmi les vivants. Ils finissent par suivre leurs semblables dans une guerre qui a commencé depuis des éons et bien avant leur retour en ce monde.
Une guerre commencée par des êtres les plus retors que le monde ait jamais connu, et qui sont les seuls, malgré le temps qui passe, à conserver la tête froide. Pardonnes-moi l'expression. Nous voilà avec des guerriers de choc, avec à leur tête des âmes noires."
Morhindafol avait terminé ici son récit pour la soirée. Et un de ses derniers récits.

Kayou se fit réveiller en pleine nuit. Il lui avait semblé avoir tout juste fermer l'œil. Mais ils se passaient quelque chose de grave. Morhindafol avait plaqué une main sur sa bouche et l'invitait au silence. Ils se levèrent comme un seul homme. L'Elfe prit une direction qui semblait quelconque dans la nuit noire. Kayou le suivit en taisant ses pas autant que faire se peut. Au bout d'un moment, ils aboutirent devant un rocher énorme.
-"Dépèches-toi, grimpe."
Il l'aida à monter, puis escalada la paroi à sa suite.
-"Que se passe-t-il?", demanda Kayou, une fois qu'ils se furent bien installés au sommet.
-"Ils arrivent."
-"Ils arrivent? Tu veux dire les morts-vivants viennent sur nous. Mais… ce n'est pas une position défendable dans le temps, ici, tu le sais mieux que moi. Ils n'auront qu'à attendre qu'on se meure de faim."
-"Ce serait vrai si nous étions seuls. Il va nous falloir tenir un moment. Je ne sais pas combien ils sont, mais nous devrons tenir vaille qui vaille. Et ne te gênes surtout pas si tu dois te défendre. Tu as suffisamment de matière première, ici. Ton premier combat, si je ne m'abuse. Une dernière prière peut-être?"
Kayou n'en revenait pas qu'il puisse plaisanter en pareil instant. Se moquait-il seulement de lui? Il le souhaitait de tout son cœur. Il n'était pas près à affronter des périls, de nuit. Il ne se sentait pas l'âme d'un guerrier, encore moins d'un héro. Un tremblement sourd se fit entendre.
-"Ils sont au moins une dizaine. Prépares-toi, mon ami. Que ce combat soit un prélude à ton avenir de combattant de la vie."
-"Mais je ne veux pas être un guerrier. Je ne veux pas me battre."
-"Ha ha ha. Il aurait été bon de me prévenir plus tôt. Tout ce que je t'ai enseigné, c'est pour"
-"me préparer au combat, oui, je sais. Je l'avais compris. Mais vous ne m'avez jamais rien demandé. Vous ne m'avez jamais donné le choix."
-"Tu le savais, tu l'as donc accepté. Et aujourd'hui, tu as encore le choix: bats-toi ou meures. La vie peut être cruelle, je le sais, mais c'est la vie. Ils sont là!"
Une, deux, puis trois silhouettes se démarquèrent dans les ombres lunaires projetées sur le sol. Puis quatre, cinq. En effet, ils étaient une dizaine. Etrangement, cela rassura Kayou que Morhindafol possédait toutes ses facultés malgré la situation. Il reprenait confiance et s'imbiba de l'aura d'assurance de l'Elfe pour se calmer.
-"Quand tu veux, Kayou."
Ils étaient deux contre dix, mais ils étaient prêts à les accueillir. Kayou se concentra sur son environnement. Il avait à sa disposition des pierres de toutes tailles et en quantité. Et bien la danse va commencer. Il essaie de repérer les rochers sous les pas des assaillants et les fait exploser. Perdant leur équilibre, torturé profondément dans la chair, ils ne s'en relèvent pas moins rapidement. Leur cri augmente de volume, leur colère semble avoir gagné en intensité. Ils se remettent à l'assaut.
-"Notre ami Tauren ne sera pas content du tout!", dit Morhindafol.
Il se leva et tendit les bras en avant. Une brise se leva, de plus en plus forte, et déracina un arbre qui tomba sur les premiers guerriers. Des cris de colère émanèrent de ceux-ci, frustrés de se retrouver immobilisés. Mais les autres approchaient toujours. Ils semblaient y avoir également femmes. Et si Kayou n'avait pas été aussi dépassé par les évènements, il aurait peut-être déjà reconnu la démarche de l'une d'elle.
Les morts-vivants encore libres de leur mouvement continuaient leur avancée. Loin d'aider leurs compagnons coincés sous l'arbre, ils n'hésitaient pas à marcher sur le tronc qui n'était pour eux qu'un obstacle parmi d'autres sur leur chemin. Les armes brandies, ils n'avaient d'yeux pour les deux victimes. C'était une compétition qui s'était engagée. Au premier qui les abattrait.
Un deuxième arbre se mit à flancher. Mais cette fois-ci, le tronc s'embrasa et tomba à côté de ses cibles. Le feu commença à se répendre.
-"C'est gênant, ils ont un magicien avec eux."
Des pierres se mettent à siffler à leurs oreilles et Morhindafol, percutée par plusieurs d'elle, tombe en arrière. Kayou se jette sur lui pour le maintenir. Une blessure à la tête saigne abondamment. Il plaque sa paume dessus.
-"Correction: il y en a au moins deux."
Les pierres continuent de siffler, aussi Kayou se maintient aussi bas que possible.
-"La Terre, Kayou, c'est ton cercle. Tu peux t'en protéger."
C'était exact. Toutes les pierres qui passaient, ils les sentaient approcher. Il pouvait influer dessus. Il avait d'abord voulu les arrêter, mais le mort-vivant semblait plus puissant que lui. Il se contentait donc de les dévier de leur trajectoire. Ils étaient donc à l'abri. Des pierres en tout cas. Morhindafol écarta Kayou et se mit à plat ventre. Kayou put alors se concentrer davantage sur sa magie. Un festival de pierres et de poussières se mit à balayer les assaillants. Ces derniers étaient ralentis, mais guère plus. Un hurlement féroce se fit entendre d'un coté de la forêt, suivit de pas de course imposant et lourd.
Taurino chargea. Une bête en furie. Il était plus loin, vers les derniers assaillants et les magiciens retardataires en prirent pour leur compte. Ils furent envoyés en l'air et projetés contre les arbres. On sentait la férocité du Tauren dans les mugissements qu'il lançait à chacun des ses coups. Il fit face au feu qui se propageait et lança une véritable averse qui éteignit instantanément le feu. Puis il fit face à ses ennemis, les crocs sortis et la mine sombre.
Si la situation s'était restée ainsi, les morts-vivants auraient eu une victoire facile. Aussi violent que puissent être les coups du Tauren, ils se relevaient à chaque fois. Les magiciens prirent leur distance pour lui infliger des dégâts alors que les guerriers blessaient le Tauren avec leurs armes. Tôt ou tard, Taurino aurait succombé. Puis ils seraient tranquillement passés à Kayou et Morhindafol. Ces deux derniers tentaient ce qu'ils pouvaient pour occuper les morts-vivants les plus proches d'eux, mais rien n'y faisait. A deux ou trois contre dix, le combat était perdu d'avance. Etait-ce là l'allié que Morhindafol attendait. Kayou n'en revenait pas. Qu'est–ce que cela avait changé. Il y aurait simplement une victime de plus.
Tout d'un coup, les morts-vivants s'arrêtèrent. Des bruits de chevaux commençaient à se faire entendre. Aussi loin que le Tauren puisse être, Kayou aurait pu juré l'avoir vu sourire. Les morts-vivants se mirent à décamper à l'opposé du bruit. Le Tauren ne se jeta pas à leur trousse, mais se dirigea droit sur le rocher, et c'est d'un bond gigantesque qu'il en atteignit le sommet.
-"Regardes", dit-il.
De leur point de vue, ils virent une douzaine de chevaux traverser leur champ de vision à toute allure, telles des flèches pointées sur le dos des fuyards. On entendit quelques instants après des bruits d'un combat, très bref. Puis le silence.
-"Qui est-ce, Morhin?"
-"Des GARDIEN, Kayou, des GARDIEN. Vas voir, mais annonces-toi à eux. Je t'attends ici. Rejoins moi après."
-"Tu es sûr que ça va?"
-"Ne t'inquiètes pas, mon ami, j'en ai vu d'autres. Vas, Taurino va rester avec moi."
Le Tauren n'avait pas dit un mot, et regardait fixement Morhindafol. Il se passait encore quelque chose, mais Kayou ne savait pas ce que c'était. Il descendit du rocher et se dirigea vers les bruits de voix qui commençait à rapporter les résultats du combat.
-"Il y a quatre femmes. Je n'ai jamais vu ça."
-"Oui, et la majorité des hommes sont des éveillés, et ça ne date guère vu leur état. Paix à leurs âmes tourmentées."

Taurino et Morhindafol se tenaient toujours sur le rocher. Un silence sinistre s'était installé entre eux.
-"Tu vas mourir, Morhin."
-"Je sais. Cette fois, ils m'auront eu. Je vais rejoindre mes camarades qui m'ont précédé. Mais il faut que je dise quelques mots à Kayou avant de partir. Il aura des questions, comme toujours. Je te demanderais une dernière chose, mon ami. Déposes moi contre un arbre, je t'en prie. Ce sera ma dernière volonté. Ne faire qu'un avec la nature."
-"Tout revient à la nature."
-"C'est vrai, tout revient à la nature. S'il te plaît."
-"Très bien."
Il le prit dans un bras, et Morhindafol fit une grimace de douleur. Le Tauren sauta à bas du rocher, et déposa l'Elfe contre un arbre, comme il aimait si souvent le faire. Ils se regardèrent dans les yeux un moment.
-"Adieu, Morhindafol." Il se retourna et partit.
-"Adieu. Taurino."

10. Un GARDIEN en devenir

Kayou se dirigeait au son des voix qu'il entendait. La nuit commençait doucement à laisser poindre l'aube naissante. Il ne marchait pas silencieusement. Bien au contraire, il faisait craqué les branches sous ses pas. Il aurait été mal avisé de surprendre un guerrier après un tel massacre. Des corps gisaient, de-ci, de-là. Si les morts-vivants ne charriaient plus de sang, ils n'en perdaient pas moins un liquide noirâtre suintant de toute part.
Les GARDIEN ne faisaient pas attention à Kayou. Ils avaient fort à faire. Beaucoup soignaient leur monture et briquaient leur attirail de guerre pour leurs batailles à venir. D'autres parcouraient les corps à terre en faisant des signes religieux, après avoir mis les corps dans une position …
Kayou était stupéfait par la constitution de ce groupuscule.
S'il y avait surtout des hommes, les femmes n'en étaient pas moins présentes. Et elles bénéficiaient du même respect que les hommes. Mais plus étrange encore, toutes les races semblaient représentées. Humains, Elfes, Nains, et Gnomes. Mais également Taurens, et probablement des Trolls et des Grunt, autant que Kayou put en juger, car ils n'en avaient jamais vus auparavant. Ils possédaient tous une monture adaptée à leur race. Kayou fut stupéfait devant la monture tauren. D'une patte, elle pourrait l'écraser. Il comprenait un peu mieux l'état de certains cadavres.

Kayou ne décrocha pas un mot de sa propre initiative. Il se contentait d'observer ces hommes et ces femmes unis par un but commun, la vie, qui aussi paradoxal que cela puisse paraître, consistait à lutter contre le fléau mort-vivant et en éradiquer les soupirants. Peu de GARDIEN avaient le sourire aux lèvres. Ils ne luttaient pas par plaisir, mais par devoir envers la vie. Et ils savaient très bien le risque qu'ils couraient dans la poursuite de leur quête.

-"Nous n'avons qu'un blessé. Un bras de cassé. Nous avions un avantage à trois contre deux, on peut considérer qu'on s'en tire bien, encore une fois." dit un grunt.
-"Oui.", dit un homme, pensif, qui semblait être le meneur du groupe. "C'est une chance qu'ils se soient mis à attaquer le petit groupe. Nous les aurions manqué s'ils n'avaient pas fait un tel vacarme. Vont-ils bien?"
-"Tu as ici l'un d'entre eux.", répondit un elfe. "Ils se sont bien défendus."
Une demi-douzaine de visages se tournèrent de concert face à Kayou, qui s'immobilisa net. Cette image d'un groupe soudé à ce point se grava dans sa mémoire pour toujours. C'est un tableau irréel qu'ils conserveraient au plus profond de lui-même. Des êtres qui se battaient ensemble, reniant les traditions ancrées au sein des peuples des différentes races, et qui les opposaient d'habitude. L'éveil de la sagesse qui permettait de s'unir face à un mal commun.

Une monture au galop arrivait droit sur eux et détourna l'attention de tout le monde.
-"Un autre groupe plus à l'Ouest. On peut les prendre avant la nuit, on aurait un avantage supplémentaire. Ils sont un peu plus nombreux. Près d'une vingtaine. Mon Neveu a commencé à les suivre et trace le chemin."
-"En selle, compagnons." Dit l'homme, sans élever la voix. Nulle plainte ne s'éleva, malgré le peu de repos qu'ils avaient pu prendre. Tous montèrent en selle, et partirent, sans lancer un seul regard en arrière, laissant Kayou au milieu du champ de bataille. Il les regarda s'en aller vers leur prochain combat, jusqu'à ce que tous disparaissent derrière un arbre, et que les bruits des chevaux au galop finissent par s'estomper devant le chant des oiseaux. La vie reprenait son cours. Kayou était planté, se demandant s'il n'avait pas tout simplement rêvé tout ce qui venait de se passer.

Il fit demi-tour et se voulut se lancer en direction de Morhindafol. Mais un cadavre finit par attirer son attention. Un cadavre de femme. C'est la chevelure qui lui avait rappelé quelque chose. Qui avait une forme particulière, qu'il navait vu que Linael porter. Mais c'était impossible, se dit-il. Elle était morte depuis longtemps. Elle était gentille, aimante, jamais elle n'aurait souhaité revenir hanter le monde des vivants. Kayou voulut en avoir le cœur net, et il s'approcha du corps mutilé de le femme.
Il entendit une faible détonation. Le corps gisant à côté de la femme s'était changé en poussière. Il devait se dépêcher s'il voulait savoir. Il pressa le pas, saisit le visage dans une main, et le débarbouilla succinctement de l'autre.
C'était bien elle. Emaciée, fatiguée, triste, mais c'était bien Linael. La femme qui l'avait élevé, celle qui se rapprochait, à ses yeux, le plus d'une mère. Son corps s'allégea, et partit également en poussière. Kayou n'y comprenait plus rien.

Il retourna au rocher où il avait quitté Morhindafol, d'un pas las, pris dans un tourbillon de pensées contradictoires. Il n'arrivait pas à comprendre pourquoi Linael était revenue. Il ne pouvait pas y croire. Arrivé au sommet du rocher, il s'attendait à y trouver son mentor, à qui il souhaitait demander des explications. Un sursaut d'effroi le prit quand il s'aperçut de sa disparition. Il allait l'appeler quand il le vit en contrebas, appuyé contre un arbre. Il sauta du rocher et s'approcha de Morhindafol.
Il sut tout de suite que quelque chose n'allait pas. Un voile recouvrait déjà les yeux de l'Elfe.
-"Alors mon garçon, qu'as-tu vu?".
Kayou se demandait comment réagir. Morhindafol était mourant, et il ne lui restait que quelques forces, qu'il conservait juste pour lui. Il décida respecter le choix de son mentor, faire comme si de rien n'était, mais ne put tout de même pas retenir ses larmes.
-"J'ai vu les GARDIEN. Ils sont forts, et unis. Je pense que j'ai vu des Grunts, et même un Troll."
-"Oui, sûrement, les GARDIEN n'ont qu'un ennemi, le fléau mort-vivant. Ils acceptent toutes les races vivantes prêtes à se battre pour la vie. Et donc n'importe qui peut prétendre à le devenir un jour, s'il se montre courageux et fidèle. Même toi, Kayou."
Kayou baissa la tête, et dit tout bas, ayant encore du mal à y croire.
-"Et j'ai vu Linael!"
Un silence pesant tomba. Morhindafol respira deux ou trois fois, avec beaucoup de difficultés.
-"Je t'avais dit un jour que seuls des esprits puissants, et qui n'acceptaient pas la mort qui leur a été donné, se réveillaient pour continuer à errer dans le monde vivant. C'est ainsi que les premiers morts-vivants sont apparus. Mais depuis un certain temps, nous suspectons les morts-vivants de parvenir à réveiller des corps qui ne seraient jamais sortis de leur tombe de leur plein gré. C'est ce que nous appelons les éveillés. Ils n'ont pas vraiment de but, car ce n'est pas de leur volonté qu'ils errent parmi nous, et ils sont par conséquent plus manipulables, et les vrais morts-vivants savent en tirer profits. Ils parviennent ainsi à augmenter leur nombre de manières conséquentes. Pour notre plus grand malheur. Bien des clans, avec les GARDIEN, tentent d'y mettre un terme, mais leur tâche n'est pas aisée. Les morts-vivants comptent de puissants guerriers et magiciens, et semblent protégés par une force supérieur. Beaucoup ont perdu la vie à tenter de découvrir ce qui se cache derrière elle. Nous avançons doucement, et nous espérons qu'un jour, une force comparable protégera la vie également. Mais peut-être que pour réveiller une telle puissance, nous avons encore des sacrifices à faire. Et aujourd'hui, c'est mon heure."

-"Morhindafol… J'ai longtemps erré sans but. Je n'ai jamais été motivé pour quoi que ce soit. Mais ce que je viens de vivre… Ce que je viens d'apprendre… Ce qu'ils ont fait à Linael… la sortir de… elle méritait le paradis, pas ça… je ne leur pardonnerai pas. Je deviendrai un GARDIEN."
-"Je suis content que tu aies trouvé ta voie, Kayou, puisse-t-elle te mener à la vérité et libérer le monde du fléau. Adieu mon garçon. Adieu mon ami."
Kayou avait encore les yeux baissés. Quand il les releva doucement, Morhindafol avait disparu, comme absorbé par l'arbre auquel il s'était adossé. Il aurait pu jurer sentir sa présence à ses côté dans cette forêt. Morhindafol ne faisait plus qu'un avec la forêt.

Kayou était seul, mais il avait un but désormais. Et quelque soit la forêt où il se trouverait, il savait que Morhindafol l'accompagnerait. Il entendit des pas étouffé de cheval. Illohan s'approchait de Kayou. Il ne restait à Kayou qu'une chose à faire, retrouver les GARDIEN. Il leur montrerait de quoi il est capable.
Il s'était trouvé un ennemi, et non des moindres: Le fléau.

hihi

je prefere ce style d'ecriture a celui de whoami perso

Le gros pavé y'a que ca de vrai \o/

Continue j'aime bien ton histoire

Merci. J'ai déjà bien avancé le neuvième chapitre, et il doit battre en longueur les précédents.
Désolé pour les adorateurs d'histoires courtes. Si vous voulez lire l'essentiel, ce sera dans les chapitres 1, 2, 9 et 10, je pense, le reste n'étant qu'une découverte des pouvoirs de Kayou, que je reprendrais peut-être. Et peut-être pas.

Voilà, le neuvième chapitre est en place. Je rajouterais peut-être quelques lignes à la fin en fonction du développement du dixième et dernier chapitre (du premier cycle?) C'est de plus en plus long, j'ai l'impression, et je m'en excuse d'avance. N'oubliez pas de mettre vos lunettes si vous en portez.
Bonne lecture.

elle est bien ton histoire, je m'imagine facilement chaque environements, pesronnages et actions, Bref je me suis cru au cinema

mais fo kan même s'accroché pour tout lire, c'est quand même long a lire les gros pavés.

vivement le dernier chapitre