Mon nom est Soso. Je ne suis personne, sinon le courant d’air qui effleure votre nuque, ou bien juste cette ombre sur le mur de votre chambre, dont seul un œil exercé pourrait remarquer qu’aucun meuble ne la porte. Personne ne me remarque, sauf si je le souhaite : tout l’art de passer inaperçu consiste dans le fait de paraître comme tout le monde plutôt que de n’être ce que je suis : personne. Cachez vos armes et taisez vous. N’ayez l’air de rien. Ne soyez rien. Vous serez…moi.
J’ai eu la chance de naître de parents humains. J’ai eu la chance de n’être ni trop laid ni trop plaisant à regarder. J’ai eu la chance de ne porter aucun trait physique particulier qui permettrait de m’identifier. J’ai eu ces chances…le reste, je le dois à mon entraînement. Nain, gnôme, humain elfe, troll, undead, grunt ou encore la forme que je prefere Tauren, je prends toujours grand soin d’être ce qu’on attend de moi, et de dire ce qu’on veut m’entendre dire. Je ne suis pas difficile, je mange de tout.
J’aime les grandes villes, elles sont si peuplées qu’on n’y reconnaît pas même ses voisins après des années à les croiser. J’aime les ports et ce genre d’endroits mal famés : pour peu qu’on n’ait pas l’air trop riche, tout le monde vous ignore. J’aime la nuit, les ruelles, les recoins sombres. Les tripots pleins de marins, les tavernes bondées et les marchés, où l’on peut se fondre dans la foule.
Mais mon talent en matière de discrétion ne m’épargne malheureusement pas les difficultés de l’existence…Il faut bien vivre, et pour cela, j’ai décidé d’apprendre à me battre.
Oh, je trouve aisément du travail, ce n’est pas la question. On m’emploie souvent pour des petits travaux discrets comme l'espionnage. Evidemment, discrets. Mais je ne sais rien faire d’autre que de rester silencieux et invisible. Je ne suis pas un assassin, ni même un voleur. Ce n’est pas la morale qui m’étouffe, seulement l’habitude et l’expérience qui me manquent. Je n’ai pas pu bénéficié, comme certains, de circonstances favorables pour apprendre les rudiments d’un « métier » quel qu’il soit, je ne sait rien, je ne fait rien. Bien qu’il semblerait que je sois plutôt fait pourl'espionnage ou l’art du meurtre sans un murmure, plutôt que pour chanter des ballades au clair de lune ou pour pourfendre des armées de morts-vivants dans une armure scintillante.
Les petits travaux qu’on m’a confiés ne m’ont jamais apporté que quelques piécettes, juste assez pour manger, mais ne m’ont jamais amené à me surpasser pour m’améliorer. Je ne suis qu’une ombre, mais une ombre inutile. Un murmure qui ne signifie rien. Assez discret pour survivre, mais pas assez fort pour vivre.
Alors arrivé à Lorndor, j’ai décidé de prendre mon avenir en main, et de chercher du « vrais » boulots. Mais j’ai rencontré cette fille, Iris…Une elfe. Jolie, mais pas très futée à mon avis. C’est elle qui m’a entraîné vers cette voie , celle de mon propre arbitre. Je ne manque ni de courage ni de détermination, et la sale besogne ne me fait pas peur : c’est pour ça que je suis là. Voila ce que je lui ai dit, en somme. J’ai d’abord pris cette prêtresse pour une grande dame qui s’était retrouvé là par caprice, ou pour une illuminée utopiste, comme tous ces prétendus héros rêvant d’un monde meilleur…Pourtant, elle n’a pas jugé mes actes, pas plus qu’elle n’a réprouvé ma volonté de m’orienter vers des tâches obscures. Tout ce qu’elle m’a demandé, c’est de m’améliorer, encore et encore. Etrange, vraiment. Je ne comprends pas grand-chose à ce qu’elle dit, et encore moins à ce qu’elle veut. Mais elle pourra m’aider à m’améliorer dans ma maîtrise du camouflage.
Je serai puissant, je serai riche. Mais même après cela, je ne serai rien, je ne serai personne…sinon le courant d’air derrière votre nuque, ou l’ombre sur le mur de votre chambre.
_________________ Ceux qui vivent dans la crainte meurent victimes de leurs propres terreurs...
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