Inscrit le: Mar 04 Juil, 2006 16:01 Messages: 34
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Skaïa s’arrêta quelques instants, sa course avait été effrénée à travers la forêt. Elle avait finalement réussi à semer ceux qui la poursuivaient. Elle resta aux aguets plusieurs minutes tous ses sens en alerte, prête à réagir dès que nécessaire. Agile et souple elle grimpa sur un rocher. Elle courba le dos et se mit à patienter, attentive. Ses longs cheveux tombaient le long de son visage encadrant ses deux magnifiques yeux noirs. Sa tête était à moitié redressée scrutant l’horizon. Elle attendait fixant le lointain.
*Approchez vous saletés d’elfes venez goûter à mes baisers… venez goûter à mes caresses…Venez que je vous lacère de mes griffes… que je vous dépèce, vous défigure…que mes baisers soient pour vous semblables au feu qui ronge la chair…*
Toujours dans cette même position elle se mit à rire…Un rire narquois et strident. Un rire reflétant son indifférence, son mépris et sa détermination. Les feuilles des arbres frémirent, quelques oiseaux s’envolèrent. La scéne semblait gelée, son rire avait pétrifié les alentours. A l’image de Skaïa les bois semblaient en attente, la présence elfique n’était pas la bienvenue. Sans éprouver la moindre fatigue, elle attendait. La patience étant une de ses plus grandes qualités. Elle passa sa langue sur ses lèvres sensuellement, elle avait faim…faim de vengeance…faim de ces maudits elfes.
*Et bien quoi la chaleur d’une femme vous fait elle à ce point peur ? Le contact de ma peau, de mes ongles sur la vôtre vous fait il peur à ce point ? Vous laissez vous tant décontenancer par une simple femelle ?*
Elle rit de plus belle. Elle pencha sa tête en arrière et laissa s’écouler un magnifique rire de gorge. Un rire puissant, pénétrant. La forêt frémit à cet appel, la nature ne voulait la laisser sur sa faim. Un oiseau émit un sifflement, Skaïa se redressa alors tel un felin : le danger semblait s’être écarté. Elle étira tous ses membres faisant craquer un à un ses doigts.
Elle resta quelques instants interdite observant plus particulièrement ses mains, ses doigts et ses griffes. Celles-ci avaient été abîmées lors de son combat. Ses mains la lançaient, de nombreuses éraflures recourant celles-ci. Sa robe déchirée ne laissait plus aucune place à l’imagination.
Elle regarda aux alentours…un raton laveur traversait la forêt. Elle s’arrêta, s’assit en tailleur cherchant à ne faire qu’un avec la nature. Depuis bien longtemps c’est dans cette vie sauvage qu’elle avait trouvé refuge, jamais la nature et les animaux ne l’avaient déçue. Elle ne pouvait dire la même chose des hommes, des elfes, des nains ou de toute autre créature se prétendant supérieure.
Elle se concentra laissant son esprit guidé par la forêt autour. Elle cherchait de l’eau… Un bruit finit par attirer son attention. De l’eau coulait non loin de l’endroit où elle se trouvait. Elle entendait le bruit calme et tranquille de l’onde. L’eau dont rien ne perturbe jamais le chemin, l’eau symbole de vie et puissance. Skaïa faisait toujours confiance à ses sens, jusqu’à présent c’était la seule chose qui ne l’avait jamais trahie.
Elle se dirigea en suivant son ouïe et arriva au beau milieu d’une clairière. Là une rivière suivait son cours. Elle s’approcha de l’eau en grimpant sur une branche qui se trouvait en plein milieu et se pencha.
Quelques secondes lui suffirent pour apercevoir son visage dans l’eau. Elle resta songeuse quelques instants devant ce visage tuméfié et abîmé. Puis d’un mouvement de rage et de colère elle rompit la surface de l’eau pour le faire disparaître. L’eau se troublait mais son visage réapparaissait toujours. Tel une gamine elle continua ce manége un certain temps.
*Je hais ce visage, je hais ce que je suis maintenant, je hais les elfes*
Elle ne voulait plus se voir, elle continuait de rider la surface de l’eau.
*disparais, va t’en…va t’en...mais tu m’énerves…va t’en...disparais…non ce n’est pas moi…pas moi…plus moi !*
Rien ne l’arrêtait plus, voir ce reflet dans l’eau la rendait folle. De plus l’eau attaquait ses blessures, la branche appuyait sur ses jambes éraflées. Rien n’y faisait, la douleur, la fatigue ne l’arrêtaient pas. Quelqu’un passant à cet endroit à ce moment l’eut prise pour une folle.
A force de colère et de fureur elle finit par tomber dans l’eau. La fraîcheur de la rivière la calma quelque peu. Elle pencha sa tête, elle avait soif et prit de l’eau dans sa main. Elle commença alors à nettoyer son visage et ses plaies. Enlever la saleté qui la recouvrait, réajuster ses cheveux et sa robe. Quand elle eut fini elle se regarda de nouveau dans l’eau. Toujours assise en plein milieu de la rivière.
T’ai-je fait quelque chose ? Pourquoi refléter ce visage ? Ce n’est pas moi pourtant…pas moi…
De fines larmes coulèrent le long de ses joues, s’écrasant doucement dans l’eau. Un oiseau, une mésange, s’approcha de Skaïa qui pleurait. Il se posa sur une branche en face d’elle, sifflant un air entraînant et langoureux. Elle releva ses yeux noirs noyés de larmes, se leva, et s’assit sur la rive. L’oiseau continuait de chanter. Elle se redressa et se mit à danser, tenant un cavalier imaginaire. Ses cheveux se soulevaient souplement au fur et à mesure de ses mouvements. Prise dans son élan, elle dansait les yeux remplis de larmes, ses pieds fins et agiles reposant sur la mousse du sol. Cette danse ? Comment aurait elle pu l’oublier ? Elle dansait de plus en plus vite, sa tête tournait, ses cheveux volaient en tous sens, tout lui semblait trouble, ses larmes coulant sur son visage, le sel de celles-ci brûlant ses éraflures .
La danse était folle. Emportée dans un tourbillon de folie, de rage et de peine elle s’écroula sur le sol. Tombant doucement comme une feuille d’automne qui se détache d’un arbre. Sa chute amortie par la mousse, n’aggrava pas ses blessures. Impossible de trouver un quelconque repère aux alentours, tout bougeait, tout sifflait dans sa tête. La mésange continuait son chant triste et lugubre. Une dernière danse ma douce amie ? Ces mots résonnaient dans sa tête, ce chant lui devenait insupportable. Elle mit ses mains sur ses oreilles pour ne plus l’entendre. La mésange continuait : elle sortit ses griffes et d’un geste rapide et violent trancha celle-ci.
Qui es tu pour t’autoriser à me rappeler ce genre de souvenir ?
Le pauvre oiseau tomba sur le sol, arrêtant de ce fait son chant mortuaire. Un chat sauvage profita de cet instant pour l’attraper et partit aussitôt, ne voulant rivaliser avec les griffes de Skaïa.
Mais il était trop tard, trop de souvenirs refoulés, trop d’efforts d’oubli…tout remontait à la surface. Elle leva la tête vers le ciel et cria…Tous ces efforts, toute cette volonté pour enfouir et oublier et voilà qu’un oiseau, un stupide oiseau faisait tout réapparaître.
Des images revinrent par flash à Skaïa…des images qu’elle aurait voulu oublier…
Elle tapa du poing sur le sol, ne voulant plus y penser…Cela n’avait plus d’importance…Des choix tout le monde en fait. Elle en avait fait un, point ! Elle passa sa main sur son cou, se rappelant d’un baiser particulier…Et retapa du poing
*fini fini fini c’est fini ! Oublier maintenant…aller de l’avant…*
Un loup s’approcha de Skaïa. Habituée à la nature et aux animaux, elle ne bougea pas, toujours étendue sur le sol. Le loup s’approcha d’elle, donnant un petit coup de museau dans le corps. A cette sollicitation Skaïa se releva et caressa le loup…Elle ferma alors les yeux et sourit, s’adressant au loup :
Ma belle, tu es une louve n’est ce pas ?
La louve grogna comme pour acquiescer. Skaïa continuait de caresser la louve :
Je ne suis pas la seule à ressentir une peine immense…Tu as perdu tous tes petits, non ? Ne t’inquiète pas ma belle, nous finirons pas les tuer tous ces elfes… Qui peut prétendre que les animaux sont dépourvus de sentiments ? Plus d’humains que d’animaux manquent de sentiments…
Skaïa s’approcha de la louve et la serra très fort dans ses bras, mouillant de ses larmes sa fourrure. Elle leva ses yeux noirs immenses au ciel et se mit à remercier la forêt et les alentours…
Merci…merci de ne pas me laisser seule.
La nuit tombait, laissant apparaître un ciel étoilé. La louve hurla à la mort ses petits perdus, Skaïa l’accompagna de ses cris de rage exprimant son passé perdu. Lorsque leur douleur fut quelque peu apaisée, la louve s’allongea en posant sa tête sur les genoux de Skaïa. Celle-ci le nez en l’air ne pouvait s’empêcher de contempler les étoiles.
Ses yeux noirs pétillaient, impossible de dire à ce moment où se trouvait la nuit la plus étoilée. Emerveillée par tant de beauté et de majesté, elle resta le bouche entrouverte. Certes, ce n’était pas la première fois qu’elle contemplait ainsi le ciel…celui-ci avait toujours eu un effet magique sur elle. Elle se retrouvait candide comme une enfant devant ce spectacle. Skaïa ferma les yeux, apaisée rassurée, elle se blottit tout contre la louve et s’assoupit.
Une silhouette se déplaçait péniblement entre les arbres. Elle avançait tête baissée, la vue brouillée par les larmes. Elle trébucha une première fois. Sa démarche était titubante, son pas peu sûr. Elle s’arrêta, décontenancée, ne sachant ni où aller, ni même où elle se trouvait. Elle regarda à droite, puis à gauche. Des arbres. Tous semblables. Elle fit de nouveau quelques pas, se prit les pieds dans une racine, et s’affaissa doucement sur le sol. Aucun son n’accompagna sa chute. Elle se recroquevilla sur elle-même et se mit à pleurer doucement.
A cette chute, les oreilles de la louve se redressèrent. Elle leva la tête, cherchant d’où provenait le bruit. Ne sentant plus la chaleur sur ses jambes, Skaïa ouvrit les yeux et se redressa lentement. Elle aperçut non loin une forme agitée de soubresauts. Un halo doré l’entourait, protecteur. Skaïa et la louve s’entre-regardèrent, et d’un commun accord se dirigèrent vers la lueur.
D’une main tremblotante, Skaïa voulut toucher la créature au sol. Elle tendit la main, hésitante, arrêta son geste, regarda la louve. Celle-ci l’encouragea à continuer. Alors elle caressa doucement les cheveux d’où provenait la lumière, tirant ainsi la malheureuse de son isolement. Cette dernière leva son visage baigné de larmes, Skaïa put ressentir toute la peine qui l’animait. Elle fronça un sourcil, peu habituée à ce genre de situation :
Qui êtes vous ? Vous êtes perdue ?
Skaïa regretta ses paroles dés qu’elle les eut prononcées.
*Décidément, je ne suis pas douée pour les contacts*
La silhouette se releva et s’accrocha à Skaïa comme si elle était son dernier salut. Elle pleura plus fort, inondant son épaule de ses larmes. Elle tenta de prononcer quelques mots :
Je m’appelle Elyra…Excusez… moi mais… Je… au secours…
Et elle s’évanouit.
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